Fuite en avant

Photo Julie Le (Flickr)

Il roule depuis quatre heures mais la fatigue n’a pas de prise sur lui. Il n’est qu’adrénaline depuis qu’elle lui a envoyé cette photo si suggestive d’elle accompagnée d’un simple « je t’attends ? » 

C’était certainement une boutade pour elle. Elle l’espère bientôt mais au point de tout lâcher sur un coup de tête ? Pas certain.Et pourtant.

Il a juste pris le temps de rafler ses clés de voiture dans l’entrée et a tiré la porte derrière lui. Et il est descendu dans son garage. Ils habitent chacun à un bout du pays mais ça n’a aucune importance. Il a envie de ce temps avec elle, envie de la surprendre. Alors, même s’il sait qu’il arrivera trop tard pour dormir avec elle, il garde l’espoir de lui offrir un café en terrasse avant qu’elle ne parte travailler. Et un câlin, des baisers. Il pense au goût de ses lèvres et en soupire d’impatience alors que l’autoroute défile sans fin sous ses roues. Elle sera surprise. Peut-être choquée de le voir débarquer ainsi. Mais ne lui en tiendra pas rigueur. Ce qui se passe entre eux, ce qu’ils se racontent depuis quelques semaines est si fort. Surtout depuis cette fois où ils ont pu passer quelques heures ensemble à la faveur de déplacements synchrones dans la Capitale. Il se savent impatients de se goûter à nouveau.

Alors il ne regrette pas son appartement abandonné à la va vite, son absence injustifiée à son travail qui risque de lui coûter sa place. Il sait maintenant qu’il n’a qu’une vie et qu’il en commence un nouveau chapitre. Sans l’angoisse de la page blanche. 

Summer

Il était dans les meilleures conditions possibles pour vivre cet été qui n’en finissait pas. Une feuille de palmier dont le vert atténuait un peu le bleu insoutenable du ciel, un toit de paille pour le protéger d’un soleil toujours aussi chaud et un trou d’eau dans lequel se plonger quand la température devenait par trop insoutenable. 

Il s’y trouvait là, justement, à profiter d’une fraîcheur qui, tout artificielle qu’elle fût, n’en était pas moins bienvenue. Et il pensait à une autre fournaise. Celle qu’il allait rejoindre en sortant de sa baignade. Celle dont il allait mouiller l’épiderme par contact avec le sien. Celle surtout avec laquelle il vivait une relation torride depuis qu’il était arrivé ici. Elle était de ces femmes que l’on n’oublie pas de par la chaleur qui émane d’elles. Son surnom, la chaudière, était saugrenu sous ces latitudes. Il ne l’en aimait pas moins. 

Il était d’ailleurs l’heure de la rejoindre. Il sortit de l’eau sans prendre le soin de se sécher. Elle aimait s’abreuver en léchant les gouttes sur son corps. Il le savait. 

Roulette

Paris est un casino paraît-il. Mais ils n’avaient pas voulu faire de leur vie un jeu de carte. Leur rencontre était tour sauf un coup de poker et il n’y avait aucun bluff entre eux. Alors ils avaient opté pour la roulette. Pair, impair, manque, passe, rouge, noir, cela leur convenait mieux. Croupière, elle avait lancé la roue bien des fois. Joueur, il avait connu la fièvre de l’incertitude, celle de ne plus rien maîtriser. Et cela l’avait marqué.

Au final, ils en étaient sortis tous les deux gagnants et s’étaient jurés de recommencer dès qu’une nouvelle opportunité se présenterait. 

Trinquer du nombril

Il était arrivé exceptionnellement en avance sur son lieu de travail et en avait profité pour prendre un expresso dans le bar d’en face. Et c’est alors qu’il sirotait tranquillement son café qu’elle avait passé la porte. Presque malgré lui il avait souri. Elle lui avait rendu son sourire et s’était installée au comptoir sur le tabouret à côté de lui.

Et puis ils avaient engagé la conversation. Ils ne s’étaient encore jamais croisés mais travaillaient dans le même immeuble. Ils n’arrivaient juste pas aux mêmes heures. La coïncidence les avait amusés

Sa joie était montée d’un cran quand elle avait posé sa main sur le haut de sa cuisse. Là, si près de son sexe. Il s’était senti gonfler immédiatement et en avait rougi. Elle l’avait regardé d’un air interrogateur avant de commencer à faire glisser ses doigts sur son membre à travers le tissu. Devant tout le monde. il avait eu l’impression que son excitation n’allait pas connaître de limite. Il lui fallait faire quelque chose. Mais quoi ? L’embrasser ? L’entraîner à l’écart ?

Et là toute une série d’images étaient passées devant ses yeux :  

Elle était appuyée sur un lavabo, sa jupe retroussée et elle lui offrait son cul. Ou alors, assis sur la cuvette des WC, elle venait s’empaler sur lui. Ou bien encore, elle était à genoux devant lui dans les toilettes quand une demi-douzaine d’autres clients entraient et venaient l’aider à lui inonder le visage de sperme. Il allait jouir

Et puis, subitement, elle avait regardé sa montre et avait cessé ses caresses avant de se lever, payer les consommations et sortir. Mais juste avant, elle avait fait s’entrechoquer leurs tasses avant de lui remettre sa carte et de lui murmurer quelque chose à l’oreille qui l’avait troublé.

— Tchin ! nous sommes maintenant intimes. Appelez-moi vite, une pause déjeuner un peu prolongée devrait nous permettre de trinquer du nombril à présent.

Il n’avait pas pu résister à la tentation. Et avait envoyé un mail à son patron lui indiquant que, pour raisons personnelles, il devait prendre son après-midi. Avant de réserver une table dans ce restaurant dont il avait occasionnellement fréquenté le coin câlin et de proposer via SMS à son inconnue de l’y accompagner.

Elle avait immédiatement accepté.

Ils sont depuis des adeptes de ce genre d’escapades et même si, parfois, ils se contentent d’une brève étreinte dans les toilettes du lieu où ils se sont rencontrés, le restaurant est devenu leur cantine.

Voyage

La ville dormait encore lorsque je l’ai traversée pour aller prendre mon train. et la gare est quasiment déserte. Tant mieux. Il m’en a coûté de me lever si tôt mais au moins j’évite la cohue des heures de pointe.

Je suis arrivé en avance et, après avoir pris un double expresso à un automate, je me poste sur un des îlots en face du tableau des départs. Je pourrai ainsi surveiller la mise à disposition de mon TGV du coin de l’œil. Car, je dois l’avouer, mon attention est déjà prise. J’ai vu cette superbe brune descendre d’un taxi quand je suis arrivé sur le parvis et, depuis, je m’arrange pour l’avoir en permanence dans mon champ de vision. La quarantaine, plutôt grande, presque autant que moi, des cheveux ondulés qui cascadent sur ses épaules, une silhouette en courbes bien dessinée, elle a vraiment tout pour retenir mon attention. Il reste toutefois hors de question d’aller l’aborder : je me cantonne donc à mon rôle de voyeur.

Mon quai vient d’être annoncé. Je retourne prendre un café pour la route puis je me dirige vers les portiques d’embarquement. Elle est là, deux personnes devant moi. Que nous prenions le même train n’a en soit rien de surprenant, c’est le premier départ de la journée. Je me prends toutefois à rêver de me retrouver dans la même voiture qu’elle et, pourquoi pas, à des places voisines. Las. Elle poursuit son chemin alors que je suis arrivé à mon wagon. Je monte et prends place, un peu déçu. Ma machine à fantasmes s’était un peu emballée et le retour sur terre est un peu rude.

Je roule désormais depuis une demi-heure quand une subite fringale me prend. Je n’ai pas pris le temps de prendre quoi que ce soit de solide à mon lever et je commence à le payer. Une seule solution : filer à la voiture bar prendre une collation. Les tarifs y sont prohibitifs mais tant pis. Cela me servira de leçon pour mon prochain voyage

Il y a déjà du monde qui attend. Dont ma brune de tout à l’heure qui est en train de passer commande. Je prends ma place dans la file, ravi de cette nouvelle opportunité qui m’est offerte de la contempler. Elle reste sur place et va s’asseoir sur un des tabourets tandis que j’attends mon tour d’être servi. Quand il arrive, je prends une bouteille d’eau et une viennoiserie. Je n’ai pas encore envie d’un nouveau café. Puis je jette un coup d’œil rapide. Il ne reste qu’une place, non loin d’elle mais suffisamment à distance pour ménager son espace vital.

Je m’installe et commence à grignoter. Quand je la vois lever les yeux vers moi avant de se lever et de s’approcher.

— Je dois m’absenter un instant. Auriez-vous l’amabilité de garder mes affaires ?

Elle me désigne du menton son sac qu’elle a laissé posé sur le comptoir. Je l’assure de ma vigilance puis elle disparaît. Quand elle revient elle a un gobelet fumant dans chaque main.

— Je me suis dit que vous aimeriez prendre un café. Il est encore très tôt et il faut charger ses batteries pour la journée. Je vous devais bien ça pour le service que vous m’avez rendu.

C’est finalement elle qui m’a abordé. Et elle me déballe sa vie. Son métier de consultante qui l’amène de plus en plus fréquemment loin de chez elle, les difficultés que ça génère dans son couple, ses envies d’ailleurs. Je suis frappé par la similitude de nos situations Je lui en fais d’ailleurs part quand elle me demande de l’excuser pour m’avoir ennuyé avec ses petits soucis, comme pour l’assurer qu’il n’en est rien.

Et la conversation reprend. Les minutes passent. Nous nous racontons tout avec une incroyable facilité qui me trouble. Moi qui n’ai pas l’habitude de me confier, je suis comme un livre ouvert devant elle. Et je dois avouer que ça me fait du bien. Je lui raconte tout. Jusqu’à certaines de mes expériences de soumission lors de soirées en club. Elle boit mes paroles avant de me dire tout de go qu’il faudra absolument qu’elle m’accompagne la prochaine fois que j’irai. Elle a des envies similaires aux miennes mais n’a jamais osé sauter le pas. Je suis surpris et flatté par sa confiance. Nous semblons hélas être du même côté de la cravache et je me dis que nous jouerons chacun de notre côté. Mais ce sont de nouvelles perspectives qui s’ouvrent si nous sommes amenés à nous revoir, ce qu’elle a l’air de désirer.

Ma destination vient d’être annoncée dans les hauts parleurs. Il me faut regagner ma place afin de prendre mes affaires. Je vais donc devoir la laisser. Non sans regrets. Au moment des au revoir elle prend ma main et me remercie de ce moment passé en sa compagnie. Avant de déposer un léger baiser à la commissure de mes lèvres. Puis elle me tend une carte.

— Tu as intérêt à m’appeler dès que tu remontes.

Je suis touché par son tutoiement. Je le lui dis. Elle sourit. Et me dit de filer sous peine de louper ma descente. Je m’exécute, non sans lui adresser un signe de la main avant de quitter la voiture bar. En guise de réponse, elle embrasse le bout de ses doigts et souffle dessus dans ma direction.

Une fois sur le quai je prends son bristol. Et lui envoie un SMS que je n’ose pas encore ponctuer d’émojis affectueux. Elle ne se gêne pas pour en égayer sa réponse. Je suis heureux. Je ne sais pas encore si je me suis fait une nouvelle amie ou plus mais ce retour dans le sud restera gravé dans ma mémoire. Cette escapade va peut-être changer le cours de ma vie. Nous verrons bien. Il me reste à présent à reprendre mon quotidien.

Marrakech (4)

Elle prit tout son temps pour dîner. Et de là où elle était elle n’aurait pas pu le rater s’il s’était présenté dans la salle du restaurant. 

Las. Il ne pointa pas le bout de son nez durant tout le temps de son repas. Elle en fut quelque peu désappointée. Non content de lui avoir posé un lapin et d’avoir triché quand elle lui avait proposé un jeu, voilà qu’il se montrait lâche à préférer garder la chambre.

Elle prit la décision de tirer un trait sur ce triste personnage. Il ne méritait pas ses attentions. Il n’en demeurait pas moins que ses plans pour la soirée étaient contrariés. Elle qui s’imaginait passer un peu de bon temps se retrouvait sans cavalier.

Elle remonta dans sa chambre. Les lits jumeaux lui semblèrent subitement bien grands. Elle chassa rapidement ces mauvaises pensées de sa tête. Faute d’homme il lui restait au moins ses jouets. Ils lui étaient fidèles, eux. Jamais une défaillance. Toujours prêts. 

Elle commença avec son womanizer. Elle voulait commencer par une jouissance rapide et intense. Aussi elle régla aussitôt la puissance d’aspiration au maximum. L’orgasme ne tarda pas, qui lui arracha un cri.

C’est alors que, un peu rassasiée par ce premier round, elle entendit qu’on grattait à sa porte. Elle ne répondit pas. Si c’était le bellâtre il ne manquait pas d’air. Mais il n’allait pas lui gâcher un peu plus son plaisir. Qu’elle allait prendre désormais avec son Orchidée d’Idée du Désir, compagne idéale de jouissances profondes qui la laissaient systématiquement repue. 

Elle s’installa confortablement en travers du lit. Elle ne manquait pas de place. Et commença à se pénétrer avec son magnifique jouet de bois. Ses courbes et nervures étaient parfaitement adaptées à son anatomie et elle commença vite à gémir. 

On gémissait à l’unisson dans le couloir. De frustration espéra-t-elle alors que le plaisir commençait à l’emporter. Qu’elle manifestait sans la moindre retenue. Qui que ce fût, il lui fallait profiter du son de sa jouissance. 

Elle criait maintenant, agitée de spasmes, espérant que son auditeur n’en perdait pas une miette.

Et puis la houle de ses sens s’arrêta. Il n’y avait plus un bruit dehors. Elle ouvrit la porte. Personne. Mais son admirateur secret avait laissé une trace baveuse de son passage. Elle en était heureuse. 

Initiation

Mots contraints :Désir, soif, appétit, envie, convoitise, appétence, avidité, souhait, goût.

— La soirée est-elle à votre goût ?

Il tourna la tête, curieux. La femme qui lui avait lancé cette question le regardait avec convoitise. Allait-elle jeter son dévolu sur lui ? C’était son souhait le plus cher d’être pris en main dans ce lieu qu’il avait eu soif de connaître mais où il n’avait pas encore trouvé sa place.

— Oui et non Madame.

— Expliquez-vous.

— Je suis venu ici parce qu’on me l’a recommandé. Mais seul. J’ai bien observé mais il me manque quelque chose.

— Votre souhait à présent est de jouer ? Je vais voir ce que je peux faire pour vous. Mais parlez moi d’abord de vos compétences et de vos appétences. Je veux tout savoir de vous.

Il lui fit part de son désir d’être pris. Par une femme. De son propre aveu il était très anal et cherchait une partenaire qui accepte de le remplir. Pendant qu’il se livrait, elle le regardait avec une avidité croissante.

— Et si je vous fistais ? D’après ce que vous venez de me dire, c’est quelque chose qui devrait vous plaire. Mais cela n’a rien d’anodin comme pratique et, même si je on me dit experte en la matière, il faut vraiment que vous en ayez envie pour que cela fonctionne.

— Ce serait un bonheur Madame. 

Il jubilait intérieurement Il n’avait jamais osé imaginer que l’on lui propose cela un jour. 

— Alors suivez-moi. Et prenez mon sac à malices. 

Et elle prit l’escalier qui les menait aux coins câlins. Il était encore trop novice pour être donné directement en pâture au public. 

Une fois arrivés, elle le fit déshabiller. Une fois nu elle lui ordonna de se mettre à quatre pattes, les fesses relevées, offertes. Elle se mit derrière elle et passa un gant avant de l’oindre de lubrifiant. La sensation de frais le fit frissonner.

Elle commença par un doigt. Vite rejoint par un deuxième. Le troisième ne tarda pas et bientôt il ne manqua que le pouce. Elle le travaillait avec douceur. 

— Vous ne m’aviez pas menti sur votre « souplesse ». Votre cul a vraiment un gros appétit et je pense que le moment ne va pas tarder où j’aurai ma main en vous.

Puis elle se tut, attentive à ses réactions. Il soufflait, grognait, se tendait vers elle. Il sentit soudain une poussée un peu plus franche de sa part et essaya de se détendre du mieux qu’il pouvait. Il se sentait s’ouvrir comme jamais tandis que la dextre de la femme se frayait un chemin dans ses profondeurs. Et puis elle s’immobilisa. Il retenait son souffle. Y était-elle parvenue. Il n’osait le lui demander. 

— Mon cher, je me suis enfoncée jusqu’au milieu de l’avant-bras. Vous me sentez bien ? 

— Oui Madame. Merci Madame. 

Il en avait les larmes aux yeux. Sa dernière barrière venait de céder. Il ne s’était jamais senti aussi mâle. 

Marrakech (3)

Finalement elle n’avait pas attendu que le dîner arrive et était montée dans sa chambre. Depuis son balcon elle avait une vue imprenable sur le parc qui jouxtait la piscine.

Et sur le bellâtre, nu comme un ver au milieu d’un bouquet d’arbres qui ne le cachait guère. C’était son châtiment : il devait rester ici, prêt à être surpris par quiconque s’aventurerait dans les parages, en attendant qu’elle vienne le libérer et lui rendre ses vêtements.

Cela avait été finalement assez facile de le contraindre. Il s’était montré très docile à peine avait-elle élevé la voix. À moins que ce ne fût la perspective d’autres jeux qui l’avait décidé à se plier à sa volonté. Quoi qu’il en soit elle trouvait très amusant de le voir essayer vainement de se dissimuler derrière les troncs rachitiques. 

Elle fronça soudainement les sourcils. À la faveur du soir qui tombait décidément bien vite dans ces contrées et de la cloche du dîner qui avait ameuté tous les vacanciers à l’intérieur du restaurant, l’homme avait commencé à battre en retraite en faisant des haltes à tous les buissons du chemin. Non seulement c’était un goujat mais en plus il trichait. Son plaisir venait d’être gâché. 

Elle s’habilla pour descendre prendre son repas, espérant le croiser dans les couloirs et lui faire savoir son mécontentement. 

Elle ne vit personne. 

Il ne perdait rien pour attendre. 

Marrakech (2)

Le soleil avait bien décliné quand elle avait fait quitté le souk, une nouvelle tunique sur les épaules. Offerte. Le haut qu’elle avait en arrivant avait servi à essuyer les hommage appuyés des deux hommes de la boutique qu’elle avait branlés et sucés jusqu’à les faire jouir sur ses seins. 

Cette récréation lui avait aéré l’esprit et c’est l’esprit léger qu’elle regagna son hôtel. Quoi de mieux que de flâner sur une chaise longue en attendant le dîner ? 

Elle s’était donc allongée sur un transat et lisait une des revues internationales mises à disposition quand elle sentit une présence : le bellâtre du resort avait refait son apparition et était planté devant elle, un sourire niais sur les lèvres. Il ne manquait décidément pas d’air. 

Elle chercha rapidement un moyen de l’éconduire vertement avant de se raviser : elle allait lui faire payer sa goujaterie et en tirerait certainement plaisir.

— Je vous ai attendu. J’espère que vous avez une bonne excuse 

— Eh bien… C’est que… J’ai été retenu…

Elle le dévisageait, glaciale et il commençait à ne plus savoir où se mettre, dansant d’un pied sur l’autre. 

— Ah ! Et vous commencez à m’agacer à remuer ainsi ! Assis ! 

Il allait s’installer à côté d’elle. Elle lui désigna le sol 

— Par terre ! À mes pieds ! Vous ne méritez pas mieux ! 

Il la regarda avec une mine pitoyable. Puis, vaincu, alla se poser sur les dalles de ciment, les yeux baissés. 

Le jeu ne faisait que commencer.

Marrakech

Il lui avait dit de la retrouver dans le souk, troisième ruelle à gauche en partant du minaret. Quinze heures tapantes. Cela faisait un peu plus d’une demi heure qu’elle attendait. Alors de deux choses l’une : soit elle n’avait décidément aucun sens de l’orientation et s’était plantée dans les grandes largeurs, soit le beau gosse du resort lui avait posé un lapin majuscule. 

La colère commençait à la gagner, l’insolation aussi. Il lui fallait se rafraîchir les idées. Et pourquoi pas dans une des échoppes ? Faute de mieux elle assouvirait sa frustration dans d’interminables palabres avec un marchand. 

Elle entra. Il lui fallait un peu de temps pour que ses yeux s’habituent à la pénombre mais elle entendit très distinctement les chuchotements entendus des deux hommes présents dans la boutique. Elle ne parlait pas la langue mais certaines intonations étaient décidément internationales. 

L’un d’eux lui fit signe d’avancer. La quarantaine, plutôt pas mal, avec quelque chose d’animal dans son attitude. L’autre restait invisible. Elle comprit vite qu’il voulait absolument lui faire essayer une tunique mais que, pour cela, elle devait enlever ne fût ce que son haut.

Il roulait des yeux gourmands. Elle se dit que ce pourrait être pas mal comme lot de consolation. Alors elle fit valdinguer son haut. Elle était nue dessous. L’homme siffla et son compère, un jeune berbère aux yeux clairs sortit de l’ombre. Les négociations allaient pouvoir commencer